Essayer de contenir, dans une approche synthétique, l'histoire
d'une famille qui a joué un rôle éminent dans
la destinée de notre pays constitue une entreprise téméraire
et difficilement réalisable.
En effet, de la lignée des Ghika, établie sur terre
roumaine depuis le XVIIe siècle, a jailli une brillante série
de représentants de l'élite, couvrant une large palette
sociale: de Voïvodes, dignitaires, ministres, politiciens,
diplomates, militaires et personnalités religieuses jusqu'aux
hommes de science et de culture, amoureux des arts et du beau.
La souche des Ghika – à l'origine des
albanais – peut être établie avec une certaine
approximation comme originaire de Macédoine au sud de Skoplje
dans le village nommé Veles au Moyen Age et changé
après en Köprülü, le nom du fondateur d'une
grande famille de vizirs ottomans et qui les aurait aidé
dans leur ascension sociale. Il est vrai que le jeune Gheorghe
Ghika, né vers 1598, s'occupant de négoce
et conseillé par les Capoukihaÿa (ambassadeurs
– n.t.) moldaves de la Porte (La Sublime Porte de
Constantinople – n.t.) s'est installé en Moldavie avant
octobre 1624, accédant même dans les rangs des dignitaires.
Suite à la protection accordée plus tard par Vasile
Lupu (Voïvode de Moldavie 1634-1653 - n.t.) et à son
enrichissement par le négoce, il monte les échelons
sociaux, étant envoyé Capoukihaÿa à la
Porte. Marié à Smada, fille de Stamate Lânã,
Stolnic de Brosteni, il a eu deux enfants dont la descendance
– par les hommes – s'est éteinte à la
première génération sans avoir jamais porté
le nom de Ghika.
La perpétuation de la famille revient à
Grigore (Grigorascu), le fils ainé de Gheorghe, né
d'une liaison avec une catholique de Pera et qui a suivi son père
en Moldavie. Et c'est lui qui a élevé la famille des
Ghika aux rangs des grands boyards autochtones par son mariage avec
Maria Sturdza, la fille de Mateias Sturdza (Vistiernic)
et nièce de cousine germaine du Voïvode Gheorghe Stefan.
Son père, Gheorghe Ghika (Ghika Ier –
n.t.), a été Voïvode de transition se succédant
sur les trônes de Moldavie et de Valachie entre 1658-1659
et 1659-1660, au beau milieu des lutes d'endiguement du soulèvement
anti-ottoman des trois pays roumains dans la coalition organisée
par le Prince Gheorghe Rákóczi II. Gheorghe Ghika,
n'étant pas capable de faire face aux charges financières
imposées par la Porte, a été destitué
et, suite à l'intervention auprès de la Porte de Constantin
Cantacuzino (Postelnic), le trône a été
attribué à son fils Grigore Ier (Ghika
II – n.t.). Mais ni sa période de règne n'a
été exempte de troubles dues aux conflits de la Porte
avec les Impériaux et surtout aux disputes entre
les partis bourgeois. Totalement irréfléchi, Grigore
I a causé la mort de Constantin Cantacuzino en s'attirant
la haine des boyards. En profitant de la défaite des ottomans
à Leva (1664), Grigore se réfugie en Pologne, puis
à Vienne en attendant aides et encouragements des Impériaux.
Ses espoirs ne se réalisant pas, il rentre à Constantinople
et retrouve le trône en 1672. Lors de sa courte 2e règne,
l'animosité envers les Cantacuzino se manifeste violement
et après la défaite des turcs par les polonais à
Hotin en 1673, Grigore se réfugie à Constantinople
où l'hostilité de ses adversaires le fait perdre son
trône et mourut en 1674.
Ses enfants, dont Matei, le continuateur de la lignée,
vécurent uniquement à Constantinople dans le milieu
gréco-levantin du quartier du Phanar. Le mariage de Matei
avec Ruxandra Mavrocordat, la fille de Alexandru Mavrocordat l'Exaporite,
le tout-puissant Drogman de la Sublime Porte, introduit Matei dans
le monde phanariote et facilite le chemin de l'ascension politique
pour ses descendants.
Son fils Grigore II Ghika (Ghika III – n.t.),
initié dans les méandres de la politique orientale
par son grade de drogman, obtient le trône de la
Moldavie le 26 septembre 1726, en restaurant ainsi la suite des
Princes Régnants de la famille. Durant sa première
période de règne en Moldavie, Grigore II Ghika fait
la preuve de ses aptitudes diplomatiques en aplanant un fâcheux
conflit avec les Tatares qui, faute de satisfaire leurs onéreuses
revendications financières, menaçaient de ravager
le pays. En 1733 s'opère le changement des trônes,
Grigore II passe en Valachie à la place de son cousin Constantin
Mavrocordat qui passe à son tour en Moldavie. Ses changements
continuent et en 1735 on revient à la case départ.
Les remarquables qualités de diplomate de Grigore II Ghika
font leurs preuves surtout lors de la guerre austro-russo-turque
de 1735-1739 quand le Prince de Moldavie, à la demande de
la Porte, a joué le rôle d'intermédiaire et
de médiateur entre les turcs et les russes par la correspondance
et l'échange d'émissaires avec le feld-maréchal
rus Christoph Burhard von Münich, avec le secrétaire
du résident anglais à St-Petersbourg, John Bell, avec
l'ambassadeur français à Constantinople, le marquis
de Villeneuve et avec les grands dignitaires ottomans.
Ultérieurement le Prince entamera aussi des relations avec
la Prusse du Roi Friederich II le Grand. Dans la même période
Grigore II a reconstruit Curtea Domneascã de Frumoasa
de Jassy, détruite dans la guerre par les troupes russes.
L'année 1741 apporte une interruption dans son bénéfique
règne en Moldavie, due à l'assassinat à Constantinople
de son frère, le grand drogman Alexandru suite à une
dénonciation mensongère; il revient au trône
pour une courte période d'une année 1747-1748. Après,
il regagne pour une dernière fois le trône de Valachie
jusqu'à son décès le 23 août 1752. Dans
cette période il termine sa fondation de St. Pantelimon près
de Bucarest où il a construit aussi un hôpital et un
autre, St. Visarion, pour les pestiférés. Le Prince
a été enterré à St. Pantelimon sous
une dalle de toute beauté sur laquelle était gravé
l'emblème réuni des deux Principautés. Le monument
a été détruit par les communistes en 1985 en
même temps que l'église et l'hôpital, pour construire
un bâtiment dans des buts touristiques, l'Hôtel Lebãda.
Du mariage de Grigore II Ghika avec Zoe, fille du
philosophe grec Mihail Mano de Constantinople, il a eu plusieurs
enfants dont ses successeurs au trône Matei Ghika
(Ghika IV – n.t.) et Scarlat Ghika (Ghika
V – n.t.). Ils se sont succédés, avec interruptions,
aux trônes de Bucarest et Jassy de 1752 à 1766 et leurs
règnes se sont distingués par instabilité et
conflits de tout genre avec les boyards et par une fiscalité
élevée.
Après le décès de Scarlat Ghika (2 décembre
1766) enterré à l'Eglise St. Spiridon, sa fondation
de Jassy, a été choisi comme Voïvode , et avec
l'accord de la Porte, son fils Alexandru I Ghika
(Ghika VII – n.t.) qui n'a régné que deux ans,
jusqu'en 1768, à la veille de la nouvelle guerre russo-turque,
quand il a été écarté étant accusé
de sympathie pour les tsaristes.
Il a été succédé
par son oncle de cousin germain Grigore III Ghika
(Ghika VI – n.t.), le fils du drogman assassiné Alexandru
Ghika et de Ecaterina Evpraghioti, déplacé en Moldavie
où il avait déjà régné entre
1764-1767. Le règne de Grigore III en Valachie a été
court, vu que suite au déclenchement de la guerre russo-turque
de 1768-1774, il a été capturé par les russes
à Bucarest et emmené à St. Petersbourg où
il a été traité avec déférence
dans un sorte d'exil "doré" jusqu'à la conclusion
de la paix de Kucïuk Kaïnargi (1774). La Russie a insisté
alors auprès de la Porte pour qu'il soit nommé Prince
de Moldavie. Il a pris le trône dans des conditions ingrates
vu que, par des manœuvres frauduleuses et peu honnêtes,
l'Empire Habsbourgique a réussi, le 7 mai 1775, à
arracher Bucovina à la Moldavie, cédée sans
aucun droit par la Porte. Ses véhémentes protestations
n'étant pas prises en compte, Grigore III se rapproche encore
plus des russes dans l'espoir de recevoir appuis et protection de
St. Petersbourg. Mais ses calculs se sont avérés erronés
vu que, trahi par la Porte et abandonné par ceux auxquels
il a fait confiance, il trouve une fin tragique en étant
assassiné sans scrupules par les turcs à Jassy le
12 octobre 1777.
Avec la mort de Grigore III Ghika Vodã la Famille,
tombée en disgrâce, fut éloignée des
trônes des Principautés durant 45 ans, pour le restant
des règnes phanariotes. Dans l'intervalle, ses membres ont
rejoint la cause nationale roumaine et ont milité pour la
renaissance nationale.
La lignée de Grigore III Ghika s'est éteinte à
la troisième génération et le nom de Ghika
a été adopté en Moldavie par les descendants
de sa sœur Ecaterina et de Dimitrie Gheorgiade Sulgearoglu.
Des deux fils de ce couple, Constantin et Gheorghe, descendent plusieurs
branches de la famille. Ainsi, de Constantin (1745-1818), Mare
Logofãt, marié avec Maria Cantacuzino-Deleanu,
descendent Dimitrie, Vistiernic, le fondateur de la branche
Ghika-Comãnesti, et Gheorghe - la branche Ghika-Deleni. Du
frère du Logofãt Constantin mentionné
plus haut, Gheorghe (1739-1801), aussi Logofãt,
descendent les autres fondateurs de branches de la famille: de son
fils Grigore, Mare Postelnic, desendent les Ghika-Budesti,
d'un autre fils, Alexandru († 1830), brigadier dans l'armée
russe, la branche Ghika-Brigadier et enfin du dernier fils, le Spãtar
Dimitrie, les branches Ghika-Trifesti et Ghika-Kefal.
Revenant aux Ghika de Valachie, il faut rappeler que
le frère du Prince Grigore III, le Mare Ban Dimitrie
(1718-1803), boyard renommé dans son temps, a été,
de son mariage avec Maria Vãcãrescu, le père
du Prince Grigore IV, le premier Voïvode "terrien"
(dans le sens d'être choisi par ses paires roumains et sans
demander l'accord de la Porte – n.t.) de 1822 à 1828
et, de son mariage avec Elena Razu, le père du Prince Alexandru
II – le premier Voïvode du régime Réglementaire
de 1834 à 1842.et Caïmacam (lieutenant princier
– n.t.) de 1856 à 1858 avant l'Union des Principautés.
En tant que premier Voïvode "terrien", après
l'éviction du régime phanariote, Grigore IV
Ghika (Ghika VIII – n.t.) s'est avéré
accessible aux idées de modernisation, en mettant les bases
d'un processus accéléré de transformation de
la société roumaine. Par tout ce qu'il a accompli,
ce Voïvode s'est adapté aux impératifs de son
époque. Il a été le bâtisseur, en 1822,
du Palais Ghica-Tei, dans une architecture néo-classique
italienne d'influence russe, sur les fondements d'un vieux manoir
et en proximité, en 1833 et toujours dans le style néo-classique
italien, de l'église chapelle de la famille, Doamna Ghica-Tei.
Après une autre guerre russo-turque de 1828-1829 suivie de
cinq années d'occupation par l'armée tsariste et l'introduction
d'un nouveau système politico-administratif du Règlement
Organique, la puissance souveraine de la Porte et protectrice
de l'Empire rus ont nommé Voïvode de Valachie Alexandru
II Ghika (Ghika IX – n.t.), le chef de la milice
urbaine et demi-frère du précédent Voïvode
Grigore IV Ghika. Son règne de huit ans a été,
sur plan interne, tourmenté par des conflits politiques avec
les boyards libéraux et miné par une continue détérioration
des relations avec St. Petersbourg qui se mêlait d'une manière
grossière et permanente dans les affaires internes de la
Principauté Valache. Alexandru II Ghika a fait la preuve
d'un Prince attentif à une grande partie des exigences de
l'époque, avec de tendances marquées de modernisation
administrative et édilitaire-urbanistique, tant nécessaires
pour le progrès national, mais la non-compréhension
des velléités de démocratie de l'aristocratie
patriote libérale et l'aggravation des différends
avec la Cour Tsariste ont mené, suite aux injonctions de
la Russie, à sa révocation par la Porte le 14/26 octobre
1842. Mais son éviction du trône n'a pas mis fin à
son activité politique. Il est réapparu à la
tête de la Principauté Valache en tant que Caïmacam
de juillet 1856 à octobre 1858, en pleine période
des dures lutes politiques pour l'Union qui agitaient la société
roumaine. Lors de sa Caïmacamie, se sont déroulé
les élections des Divans ad-hoc dans les deux Principautés
lesquelles, après l'annulation des élections falsifiées
en Moldavie par le Caïmacam rétrograde Nicolae
Vogoridi et répétées en donnant vainqueurs
les unionistes, expriment les vœux de la majorité des
habitants: d'Union de la Moldavie et de la Valachie dans un seul
état autonome et neutre, mis sous la garantie collective
des sept grandes puissances européennes et avec un Prince
Régnant issu des maisons princières européennes.
Même en étant honnête et personnellement désintéressé,
le Caïmacam Alexandru D. Ghika est resté le
prisonnier politique de l'ancien régime et n'a pas pu s'élever
à la hauteur des nouveaux idéaux exigés par
les impératifs de la société contemporaine
à lui. C'est pourquoi, sans être un ennemi déclaré
des unionistes, il ne les a pas soutenu non plus, en ayant lui-même
des velléités de règne. Après avoir
été relevé de sa haute dignité de Caïmacam,
l'ancien Prince régnant s'est retiré discrètement
de la vie politique en s'établissant en Italie, à
Livorno, où il est décédé en 1862. Sa
dépouille a été rapatriée, il a eu droit
à des funérailles nationales et été
enterré dans la Fondation familiale de la monastère
Pantélimon dans un beau mausolée détruit par
les communistes en juillet 1985 en même temps que la démolition
de tous les autres bâtiments de la Fondation et le transfert
des ossements du Prince à l'Eglise Ghica-Tei.
Dans la même période s'est trouvé
sur le trône de Moldavie le 10e et dernier Prince Ghika de
la famille: Grigore V Ghyka (Ghika X – n.t.),
fils de Alexandru (Alecu) Ghika, Mare Logofãt, et
de Elena Sturdza, nommé Voïvode en 1849 suite à
la répression de la révolution de 1848 dans les pays
roumaines et à la convention de Balta-Liman de 1849. Entré
sur la voie des modernisations, Grigore V Ghyka Vodã ne disposait
pourtant pas de la fermeté des principes démocrate-libérales
mais possédait les disponibilités intellectuelles
pour le progrès interne et pour l'émancipation politique
externe du poids du protectorat exclusif russe. Adepte de l'absolutisme
éclairé, il prônait entente et appui pour les
libéraux modérés tout en œuvrant pour
l'Union des Principautés qu'il a soutenue jusqu'aux derniers
instants de sa vie. A la fin de son mandat il s'est retiré
en France. Nature extrêmement sensible, honnête et désintéressé,
le Prince, si bien intentionné dans ses mesures de suppression
de la censure et l'émancipation des tziganes ainsi que pour
son attitude favorable à l'Union, s'est vu soumis dans son
exil à des infâmes calomnies et dénigrements
de la part de ses adversaires politiques. Etant incapable de supporter
l'opprobre public, Grigore V Ghyka Vodã s'est suicidé
le 24 août 1857 avec un fusil de chasse. Avec toutes ses déficiences,
les Principautés roumaines n'ont jamais connu un règne
si éclairé et si dévoué au progrès
national que celui de Grigore V Ghyka Vodã.
Comme nous l'avons déjà dit, la famille
Ghika a donné à la Roumanie, mis à part les
10 Princes Régnants, un grand nombre de personnalités
de la vie politique, diplomatique, scientifique et culturelle du
Pays. Sous le régime phanariote se sont détaché
des esprits doués dont Alexandru Ghika, le Drogman
tué par les turcs en 1741, Dumitrache Ghica (1718-1803),
le Mare Ban, père de Grigore IV Ghika Vodã
et de Alexandru II Ghika Vodã ou Mihalache Ghica (1794-1850),
Mare Vornic, archéologue et collectionneur reconnu,
fondateur du Musée National d'antiquités. De son mariage
avec Ecaterina Faka est née Elena (1828-1888), épouse
du knéaz rus Alexander Koltzov-Massalski, écrivaine
appréciée sous le pseudonyme Dora d'Istria et chercheuse
du passé de sa famille, établie en Suisse et en Italie,
avec une mémorable ascension du Mont Mönch des Alpes
Suisses en 1855 (11 juin 1855 – 4104 m. - première
ascension réalisée par une femme – n.t.).
Dans l'époque moderne on peut encore mentionner dans la branche
Valache de la famille le très connu Ion Ghica (1816-1897)
participant à la révolution de 1848, plusieurs fois
premier ministre sous Al. I. Cuza et Carol 1er, représentant
diplomatique de Roumanie à Londres, écrivain apprécié,
publiciste et économiste, cinq fois élu président
de la Société Académique puis de l'Académie
Roumaine, pour ne plus rappeler gouverneur puis Prince de Samos
nommé par la Porte (1854-1858).
Puis il y a Dimitrie Ghica (1816-1897), fils de Grigore IV Prince
de Valachie et de Maria Handjery, plus connu comme "Beïzadea
Miticã", conservateur modéré, ministre
des travaux publics, des affaires étrangères, de l'intérieur,
de la justice et premier ministre (1868-1880), sous Carol 1er s'est
inscrit au Parti National Libéral (1881) et s'est fait remarqué
en qualité d'éphore de l'Ephorie des Hôpitaux
Civils (1868-1889, 1896-1897) tout en œuvrant pour la reconstruction
de l'asile "Elena Doamna" et la construction des Bains
de l'Ephorie.
Un autre "beïzadea" (fils
du Prince Régnant – n.t.), Ioan Grigore Ghika (1830-1881),
fils de Grigore V de Moldavie et de Elena Sturdza, officier supérieur,
colonel puis général de division, aide-de-camp de
Al. I. Cuza, plusieurs fois ministre de guerre entre 1860-1866;
entré en diplomatie, a été agent résident
à Constantinople 1872-1877 puis de1878 jusqu'à son
décès en 1881, ministre plénipotentiaire à
St. Petersbourg. On peut aussi mentionner Dimitrie Ghika (1875-1967)
fils du précédent, politicien et diplomate de la génération
suivante, membre de la Délégation de la Roumanie à
la Conférence de Paris (1919), ministre à Paris et
Rome (1922-1928), ministre des affaires étrangères
(1931-1932), de nouveau nommé à Rome, Bruxelles et
Luxembourg (1932-1937) et sénateur (1939). Son frère
a été Vladimir Ghika, le très connu prêtre
catholique (1923) et protonotaire apostolique (1931), sensible homme
de lettres et philanthrope, mort dans les geôles communistes
en tant que martyr de sa foi.
Parmi les Ghika Valaches il faut mentionner le mathématicien
Alexandru Ghika (1902-1964), descendant de Grigore IV, membre de
l'Académie Roumaine (1963).
En Moldavie on remarque dans la branche Ghika-Comãnesti:
Dimitrie, juriste et explorateur qui a obtenu sa renommée
lors de l'expédition organisée en 1895-1896 avec son
fils Nicolae (1875-1921) au "corne oriental" de l'Afrique,
région qui couvre aujourd'hui la Somalie et le sud-est de
l'Ethiopie, avec d'importants résultats scientifiques. Le
père à écrit ses mémoires d'expédition
dans l'ouvrage "Une expédition roumaine en Afrique"
(1897) et le fils dans "Cinq mois au pays des Somalies"
(1897). Nicolae a revisité l'Afrique en 1899 en explorant
les Monts Atlas au Maroc et en 1910-1911 a traversé deux
fois l'Atlantique pour parcourir l'Ouest des Etats Unis, le Canada
et Alaska dans des buts d'exploration et de chasse. Ultérieurement
il est entré en politique comme membre du parti conservateur
de Alexandru Marghiloman dans le cabinet duquel a été
ministre des travaux publics en 1918.
Son oncle, Eugen Ghika-Comãnesti, a été volontaire
dans l'armée nordiste lors de la guerre de sécession
des Etats Unis entre 1861-1863, étant blessé de guerre
et promu au grade de capitaine. En 1875, ses tentatives de s'inscrire
dans l'armée roumaine n'étant pas couronnées
de succès, il entre dans le Parlement en tant que représentant
du district de Bacãu. Par son mariage avec Ioana Ecaterina
Keshko il devient le beau-frère de Milan Obrenovici, le roi
de Serbie.
Enfin, dans la branche Ghika-Budesti on peut citer Eugen (1843-1919),
amateur des arts et lui-même peintre ainsi que son fils, né
de son mariage avec Elena Cantacuzino, l'architecte Nicolae Ghika-Budesti
(1869-1943), talentueux historien d'art, professeur à l'Ecole
Nationale Supérieure des Beaux-arts et membre d'honneur de
l'Académie Roumaine (1937), auteur apprécié
de l'ouvrage de référence dans le domaine "l'Evolution
de l'architecture religieuse de Valachie et Olténie"
(4 vol., 1927-1935). Son fils Stefan (1904-1959), né du mariage
avec Madeleine Landrieu, a été un talentueux géologue,
membre d'honneur de l'Académie Roumaine (1955).
Nous avons donc réalisé une vue panoramique
– et à fortiori de surface – sur l'histoire de
plus de quatre siècles d'une famille qui a évidemment
joué un rôle majeur dans la destinée de notre
pays, tant dans sa vie en tant qu'état que dans celle politique,
scientifique et culturelle, laps de temps lors duquel elle s'est
apparentée avec les plus illustres familles bourgeoises autochtones:
Bals, Bãlãceanu, Cantacuzino, Costache, Bãleanu,
Cretzulescu, Donici, Grãdisteanu, Greceanu, Filipescu, Florescu,
Miclescu, Olãnescu, Russo, Sturdza, Stirbei, Vãcãrescu
et beaucoup d'autres, ou appartenant aux phanariotes Caradja, Handjery,
Mavrocordat, Moruzi, Sutzu, ainsi que les alliances avec des familles
de toute l'Europe: les comtes polonais Rzyszczewo, les comtes italiens
Ruspoli, les marquis français de l'Aubespine-Sully, les vicomtes
anglais de Bollingbroke, les kneaz russes Trubetzkoï et Kolzof-Massalski.
De par son passé, la Famille Ghika condense,
d'une certaine manière, l'histoire du pays; c'est pourquoi
il faut la considérer avec respect et entière déférence.
|